DIRECTION GESTION ENTREPRISES MEDEF SECONDE INDUSTRIALISATION CAPITAL TRAVAIL PRODUCTIVITE PHALANSTERES FAMILISTERES TAYLOR SCHUMPETER cours de SES première terminale sciences économiques et sociales management gouvernance des entreprises

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DIRECTION ET GESTION DES ENTREPRISES DE LA SECONDE INDUSTRIALISATION AU LENDEMAIN DE LA PREMIERE GUERRE MONDIALE

En 1886, l’ingénieur Watrin est défénestré à Decazeville. Les mineurs de charbon s’opposent au patronat local, l’ingénieur qui assure la médiation entre la base des ouvriers et la direction subit la violence mortelle d’un mouvement protestataire.  Le premier mai 1891 à Fourmies, commune du Nord, au cours d’une manifestation ouvrière, la troupe tire sur la foule tuant neuf personnes et en blessant soixante. Ces deux exemples montent parfois la dureté des rapports entre la direction des entreprises et les travailleurs. Dans la France du début de la Seconde industrialisation, les rapports sociaux ne sont pas toujours aussi violents dans le monde de l’entreprise. En effet, la France des années 1880 reste essentiellement rurale avec une forte proportion de personnes travaillant dans l’agriculture. La population de la France dans les années 1880 est de trente-six millions de personnes, avec 70 % de ruraux. Après la guerre contre l’Allemagne en 1871, le régime politique est celui de la Troisième République. En 1911, les ruraux ne sont que 56 % et la France compte six millions de salariés. Au recensement de 1906, 70 % des établissements ont un seul travailleur. On constate que la grande majorité des entreprises ont peu de travailleurs, ce qui constitue une des caractéristiques du système industriel français surtout si on le compare à l’Allemagne. L’entreprise peut être définie dans son acception la plus large comme l’organisation qui permet de produire des biens et des services à caractère commercial. L’entreprise représente le monde industriel mais aussi bancaire et commercial. A la tête des entreprises, les dirigeants coordonnent l’ensemble des facteurs de production et notamment les deux principaux : le travail et le capital. La direction rassemble les membres du conseil d’administration d’une entreprise, c’est le lieu où se prennent les décisions stratégiques de l’entreprise qui s’engage dans ses choix futurs. Les décisions étant prises, la direction et l’ensemble du personnel d’encadrement assurent la mise en exécution des décisions, c’est la gestion de l’entreprise. Le directeur, les chefs de service, les ingénieurs… gèrent les facteurs de production dont ils ont la charge dans le but de produire des biens ou des services et cela quel que soit l’activité de l’entreprise. Dans la Seconde industrialisation que nous daterons du début des années 1880 jusqu’au lendemain de la guerre dans les années vingt, nous étudierons la direction et la gestion des entreprises.  Gérer une entreprise implique de mettre en œuvre des facteurs de production, essentiellement le capital et le travail. On peut s’interroger sur les objectifs des dirigeants, les facteurs exogènes qui ont suscité cette mobilisation, les moyens mis en œuvre et les réactions des travailleurs. La direction et la gestion des entreprises de la Seconde industrialisation connaissent-elles des changements importants ? Quels sont les facteurs économiques et sociaux qui les modifient ? Comment l’entreprise s’adapte-t-elle et comment peut-elle influencer le monde environnant ?

Nous nous attacherons d’abord à la direction et à la gestion des entreprises de 1880 au début du 19e siècle, en essayant de montrer comment l’entreprise gère ses facteurs de production, gère sa production et son personnel en fonction des changements et des contraintes du marché. Nous montrerons par la suite l’influence des changements sociaux sur la gestion des entreprises et les modifications importantes dues à la Première Guerre mondiale, ainsi que l’apport des nouveaux marchés dans la stimulation de la production.

La direction et la gestion des entreprises connaissent de profonds changements dans la période qui va de 1880 à la fin du 19e siècle. Ces changements s’opèrent dans le processus de production et modifient le procès de travail. Les entrepreneurs prennent en compte les nouvelles inventions, les nouveaux marchés. Les dirigeants essayent de gèrer aussi d’une façon différente le personnel pour accroître les gains de productivité. La France de la première industrialisation était surtout marquée par la proto industrialisation où le travailleur travaillait sur son métier et souvent habitait dans les campagnes. La seconde industrialisation est marquée par l’apparition de nouvelles applications techniques qui modifient profondément le processus productif et ouvrent aux entreprises de nouveaux marchés.

L’électricité connaît, avec notamment les retombées de l’Exposition universelle de 1888, un engouement important. L’électricité se substitue à l’autre forme principale d’énergie : la vapeur et fait naître de nouveaux produits, de nouveaux marchés et de nouvelles entreprises. De nouvelles entreprises sont crées et s’adaptent à ce nouveau marché. Henri Morsel dans le livre sous la direction de François Caron et Fabienne Cardot : Histoire générale de l’électricité en France en 1991, décrit les trois principaux facteurs qui ont permis le développement du marché de l’électricité. Ces trois facteurs sont le développement de la consommation à Paris, l’expansion de l’industrie électrochimique et électrométallurgique dans les Alpes et la création d’un nouveau marché avec la construction de lignes de tramway dans les grandes villes.

Les applications de l’électricité permettent la création de nouvelles entreprises qui doivent aussi adapter leur gestion aux techniques nouvelles. En 1898, Paul Azema crée la CGE (Compagnie Générale d’Electricité) pour produire et distribuer l’énergie électrique. Paul Azema doit adapter toute son entreprise naissante à ce nouveau marché. Les qualifications du personnel deviennent nécessaires, on ne travaille pas sur du matériel électrique comme sur un métier à tisser ce qui implique de former la main d’œuvre aux techniques nouvelles.

L’électricité est un nouveau domaine mais il en existe d’autres, notamment dans la chimie. De nouveaux produits comme les engrais sont créés, la soude, l’ammoniac, permettent à des entreprises de se lancer sur ces marchés. Des nouveaux colorants sont mis au point, de nouvelles matières sont inventées comme les matières plastiques et le celluloïd en particulier.

Le progrès technique et ses innovations permettent et stimulent la création des nouveaux marchés, les entreprises s’adaptent, recherchant le profit ou l’espoir de gains. Ces nouvelles applications techniques modifient la structure des entreprises. Les entreprises doivent adapter leur structure juridique en fonction du développement du marché. Dans la première industrialisation les entreprises étaient souvent des sociétés en commandite simple où les apports de capitaux étaient essentiellement familiaux ou provenaient de banquiers locaux. Dans la seconde industrialisation, la structure juridique est amenée à se modifier pour s’adapter à l’environnement. Les nouvelles techniques nécessitent de forts investissements initiaux et la structure juridique de l’entreprise prend la forme de sociétés anonymes pour rassembler les capitaux nécessaires. Les dirigeants français font cependant moins souvent appel aux banques que les Allemands et préfèrent financer leurs investissements par  l’autofinancement. C’est le cas de ouis Renault qui crée son entreprise dans un secteur nouveau l’automobile en 1858, et se finance toujours par l’autofinancement en réinvestissant les profits de son entreprise.

Le début de la seconde industrialisation qui va des années 1880 jusqu’au début du 19e siècle est marqué par l’apparition de nouveaux marchés dus à de nouvelles applications techniques. Dans l’ensemble, le démarrage est plutôt lent et l’organisation des entreprises se fait sur une base locale. Les entreprises se créent et se gèrent d’une manière à couvrir une région et ses besoins, mais rarement la France tout entière, le développement à l’international est faiblement envisagé. Ses nouvelles méthodes de gestion sont mises en place progressivement et la production de biens et de services demande l’emploi d’un personnel de plus en plus qualifié. La fin du siècle est marquée par la création de nouvelles écoles d’ingénieurs pour assurer l’encadrement de la main d’œuvre. L’Ecole supérieure d’électricité (Supélec) est crée en 1894 à Paris, en province les Instituts d’électrotechniques de Toulouse et Grenoble sont créés pendant cette période pour pallier le manque d’encadrement d’une main-d’œuvre qui travaille désormais dans de nouveaux domaines. La direction des entreprises s’adapte aux nouveaux produits, aux nouveaux marchés, modifie-t-elle ses rapports avec ses salariés ? Comment l’entreprise du début de la Seconde industrialisation gère-t-elle son personnel ?

La relation qui s’instaure entre les dirigeants des entreprises et leurs ouvriers peut conduire à deux logiques, celle du paternalisme ou celle de la contrainte, de la surveillance comme l’explique M. Foucault dans son livre : Surveiller et punir.

En France, pays de tradition chrétienne, le patron peut se penser comme le « père » de ses ouvriers. C. Charle, dans son livre : Histoire sociale de la France au XIXe siècle écrit : « le patron pense qu’il fait vivre son ouvrier comme le père de ses enfants ».

Le souci du patronat est d’avoir une main d’œuvre disponible, de la fixer pour éviter une chute de la production, de la rendre plus docile et moins revendicative. Il cherche à récompenser les meilleurs et dialogue plus facilement avec eux. Cette gestion de l’entreprise sur le mode paternaliste, fait de l’usine, une extension de la cellule familiale. Le patron remplace l’homme, il dirige son entreprise en « bon père de famille ». Il n’hésite pas à inviter les méritants aux fêtes familiales comme peuvent le faire dans les années 1880 la famille Schneider au Creusot dans la Saône et Loire. La gestion de l’entreprise est familiale et les rapports, en ce début de seconde industrialisation, entre les ouvriers et la direction, sont souvent des rapports directs non médiatisés par des contremaîtres ou des ingénieurs.

Cette gestion de l’entreprise sur un mode paternaliste a pour but essentiel de fixer durablement la main d’œuvre locale et rurale et même parfois d’attirer une main d’œuvre régionale mieux qualifiée. Un exemple intéressant qui illustre bien le côté paternaliste du patronat est le fabricant de poêles, J.-B. Godin  à Guise dans l’Aisne.

J.-B. Godin s’est inspiré des thèses de Fourier qui prévoyait la formation de phalanstères harmonieux. Godin crée le Familistère qui comprend l’usine de poêles et le « village » pour les ouvriers. L’ensemble permet une vie autarcique, chacun trouve sur place, en plus de son travail, un logement, une école pour les enfants, un lavoir, un économat, des lieux de culture comme une bibliothèque. La vente dans l’économat se fait sur un livret de crédit où les achats sont comptabilisés. J.-B. Godin innove dans le domaine de l’hygiène et de la sécurité. Le rapport de gestion entre les ouvriers et Godin est un rapport presque filial et se résume par : l’ouvrier travaille bien, c’est son devoir, le patron lui assure le revenu, le logement, éduque ses enfants,… c’est sa conception de ses devoirs. L’ouvrier est encadré du « berceau à la tombe ». L’entreprise dans cette conception de la vie n’est qu’une partie d’un exemple beaucoup plus vaste et qui la dépasse.

L’exemple du Familistère de J.-B. Godin montre que l’entrepreneur paternaliste ne prend pas en compte une gestion du personnel rationnelle basée sur un simple contrat de travail, mais l’intègre dans un ensemble de droits et de devoirs envers son entreprise qui dépasse le simple rapport salarial et productif. Les mines de houille de Blanzy est un autre exemple d’entreprise paternaliste où le président Chagot gère son entreprise en « bon père de famille ». Ce mode de gestion des employés et des ouvriers a pour but essentiel de fixer une main d’œuvre locale car le travail industriel est souvent perçu comme un travail d’appoint. La période du début du XIX siècle à la guerre de 1914, va connaître de profondes mutations. Le paternalisme pourra-t-il continuer à gérer l’ensemble du système productif dans un rapport filial ? même si ce mode de gestion est rare et de nombreux entrepreneurs ont des rapports avec leur personnel qui sont souvent basés sur la contrainte et la surveillance.

L’économiste J. Schumpeter s’appuie sur les cycles Kondratieff pour noter les périodes de croissance ou de dépression économique. Pour lui, 1896-1913 est une période de croissance économique où la dynamique de la création d’entreprise est forte. Les entreprises intègrent dans la gestion, une volonté de production de masse et un besoin de rationalisation de la production. La taille des entreprises reste néanmoins très petite puisqu’au recensement de 1906, 70% des entreprises ont un seul travailleur et on ne compte que 189 établissements de plus de mille employés. Les secteurs qui regroupent les grandes entreprises sont la mine, la sidérurgie, la métallurgie et le textile.

Dans la grande entreprise, on quitte le monde de la proto-industrialisation et du paternalisme pour rentrer dans un nouveau monde de gestion. La volonté des dirigeants est de produire en faisant des économies d’échelle. C’est notamment le cas dans l’entreprise sidérurgique du Creusot qui appartient et est dirigée par la famille Schneider. C’est aussi le cas, dans l’entreprise de J.F. Cail qui fabrique des locomotives et qui compte plus de deux mille ouvriers à Paris au début du siècle.

Le début du XXe siècle est marqué par l’introduction en France des nouveaux modes de gestion de la production inspirés par C. Taylor. Le taylorisme ou l’Organisation Scientifique du travail, introduit une gestion radicale dans le procès de travail. Pour éviter la « flânerie », l’absentéisme et mieux contrôler le processus productif, le taylorisme impose une séparation entre la conception et l’exécution des tâches. Le personnel d’encadrement chronomètre le travail des ouvriers. La manufacture des Armes et Cycles de Saint-Etienne en 1885, instaure la première ces nouvelles méthodes de gestion. Les dirigeants de grandes entreprises comme Renault et Michelin s’intéressent au taylorisme. Cette volonté de rationaliser la production, d’augmenter les gains de productivité, marque le début du siècle. Les entreprises françaises restent préoccupées par la production et s’intéressent peu au domaine commercial, c’est pourquoi on assiste à l formation de cartels entre entreprises d’un même secteur pour promouvoir la vente de produits, surtout sur les marchés extérieurs.

En 1890, le cartel des chlorates est créé, en 1896, c’est la création du cartel des soudes et acides sulfuriques, en 1901, les dirigeants d’entreprise créent le cartel charbonnier du nord. On constate que la gestion de l’entreprise est axée sur la production, sur une volonté de stabiliser et fixer une main d’œuvre, de former les ouvriers et les employés aux nouvelles techniques, le domaine, pourtant vital pour une entreprise, est laissé de côté. La création des cartels par secteur d’activité permet aux entreprises françaises de s’imposer à l’étranger et notamment dans les colonies. La guerre va-t-elle bloquer ce processus ? Les méthodes de gestion du début du XXe siècle seront-elles utilisées pendant la guerre ?

La période 1900-1913 est marquée par l’introduction de nouvelles méthodes de gestion dans les entreprises avec notamment l’introduction du taylorisme. Toutes les entreprises ne connaissent pas ces nouvelles méthodes et beaucoup d’entreprises de création récente comme c’est le cas dans l’automobile, ne les appliquent pas. En 1914, éclate la Première Guerre mondiale, c’est une rupture complète par rapport à la période précédente de dynamisme économique. La guerre marque la fin des échanges dans tous les domaines. Après une erreur de prévision sur la durée de la guerre, l’organisation économique se fait entre trois partenaires, l’Etat qui coordonne, l’Armée et l’Industrie qui produit.

Les dirigeants d’entreprise se rassemblent sous l’égide du comité des forges qui assure la gestion de la production des entreprises. La gestion est pragmatique, ou s’intéresse à trouver des fournisseurs à l’étranger. L’Etat achète toute la production à ses prix, ce qui permet aux entreprises qui travaillent de faire des bénéfices. Les entreprises perdent en autonomie de gestion, mais obtiennent aussi de l’Etat, des marchés, des facilités dans l’obtention de crédits. La guerre est une période de rupture de « mise en sommeil » dans l’emploi des nouvelles formes de gestion même si elle permet de développer fortement certains domaines.

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