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En vous appuyant sur vos connaissances sur la détermination des taux d’intérêt réels et sur les mécanismes par lesquels des taux d’intérêt réels élevés affectent l’économie, ce point de vue vous paraît-il pertinent pour expliquer la crise économique des années 80 et 90 ?

Le plan Fourcade de 1974 est décidé pour réduire le déficit budgétaire, ralentir l’inflation (14 %), diminuer les importations ; cela, en particulier par une augmentation  des taux d’intérêt. Les résultats sont probants, dans une politique keynésienne de « stop and go », le « stop » a provoqué une récession avec une forte augmentation du chômage. Le deuxième plan Fourcade de 1975 est destiné à lutter contre l’absence d’emplois dans la plus pure tradition keynésienne s’appuyant sur l’intervention de l’Etat et une politique d’aide, de grands projets et de grands travaux. Le plan Barre qui suivra, visera moins une politique conjoncturelle mais une politique structurelle pour revenir aux grands équilibres économiques. Le pilotage par les taux d’intérêt permettait de réguler l’activité économique notamment dans une société qui connaît l’encadrement du crédit. Dans ce cas, ce sont les banques commerciales qui fixent les taux, via le contrôle de la Banque centrale. Le taux d’intérêt est la rémunération du capital prêté, versé par l’emprunteur au prêteur. Il a une forte importance économique dans la mesure où il permet aux entreprises et aux ménages d’investir, d’accéder à la consommation et aussi de placer des liquidités. Mais il faut distinguer les taux nominaux et les taux réels. Le premier est établi lors de la rédaction d’un contrat, c’est une variable en valeur qui s’oppose au second qui  prend en compte la hausse des prix. Un taux d’intérêt réel élevé peut ne pas être un obstacle à l’investissement, par exemple dans la mesure où l’inflation est forte. Un taux d’intérêt réel peut être négatif lorsque la hausse des prix est supérieure au taux nominal. Le phénomène s’est produit au cours des années soixante-dix, ce qui a permis notamment à certains ménages d’accéder à la propriété foncière et ce qui a concouru à la croissance économique. Celle-ci peut se définir comme une augmentation soutenue, pendant une longue période, d’un indicateur de dimension ; on prend généralement le PNB (Produit national brut). La croissance n’est pas toujours présente, elle peut alterner avec des périodes de crise. Celles-ci sont déterminées par la phase de retournement du cycle économique, qui après une phase d’expansion rentre dans une période de dépression. Nous étudierons la période 1980 -1997, en privilégiant le cas de la France et en nous interrogeant sur l’influence des taux d’intérêt réels. Sont-ils révélateurs de la crise des années quatre-vingt et quatre-vingt-dix ?

Pour répondre à cette question nous verrons d’abord la formation des taux d’intérêt en termes théoriques pour nous intéresser ensuite à des aspects plus conjoncturels.

Jean-Paul Fitoussi dans son livre : Le débat interdit, monnaie, Europe, pauvreté (1995), dans un chapitre intitulé : « la tyrannie financière » remarque le niveau trop élevé des taux d’intérêt réels, c’est-à-dire l’écart entre le taux nominal payé par les agents  et le taux d’inflation, actuellement et dans les principaux pays européens. Les taux d’intérêts réels sont de l’ordre de cinq à six pour cent. Par contre, dans les années soixante-dix, ces mêmes taux varièrent entre zéro et un pour cent et furent mêmes parfois négatifs. Un taux négatif favorise les emprunteurs au détriment des créanciers. En effet, l’augmentation continue des prix diminue le pouvoir d’achat  futur des ménages mais allège  en même temps le poids de la dette. Le loyer de l’argent  n’opère pas les remboursements des emprunts  , J.P. Fitoussi en déduit l’écart critique qui est la différence entre le taux  d’intérêt réel et le taux de croissance de l’économie. Mais avant de détailler l’influence des taux d’intérêt sur la croissance économique et ses conséquences en termes de crise ou de récession, il serait intéressant de revenir sur les principales théories de la formation des taux dans l’histoire de la pensée économique.

K. Wicksell appartenant à l’Ecole suédoise,  s’est interrogé à l’analyse macroéconomique contemporaine, notamment dans deux ouvrages : Interest and Prices (1898) et Lectures (1806) où son approche se démarque d’une perspective marshallienne, qui est plus microéconomique et basée sur la confrontation d’une offre et d’une demande sur un marché. Celle de Wicksell est dynamique et s’étudie en termes de déséquilibre. Il introduit la définition du « taux naturel de l’intérêt » qui accorde, à l’équilibre, offre de biens capitaux et demandes de biens capitaux, assure l’équilibre entre épargne et investissement. Wicksell note dans ses lectures d’économie politique que le taux naturel « correspond plus ou moins au rendement attendu du capital ». Dans la théorie wicksellienne, quand le taux d’intérêt offert par les banques descend en-dessous du taux naturel, celui qui assure l’équilibre entre épargne et investissement, il risque d’y avoir surinvestissement qui peut entraîner l’économie dans une spirale inflationniste. L’Etat, via la banque centrale ou les banques commerciales, peuvent arrêter ce processus.

Le taux d’intérêt « naturel » rejoint le taux d’intérêt réel et à l’inverse des taux faibles, les taux réels élevés peuvent réduire les possibilités d’investissement et provoquer ainsi une récession économique. A l’opposé, Wicksell parle de ce « processus cumulatif » dans la mesure où la rentabilité du capital étant supérieure aux taux d’intérêt sur les crédits proposés par les banques, la hausse de prix diminue le coût réel des emprunts. Les années soixante-dix rassemblaient l’ensemble de ces éléments (inflation, croissance de la production, coûts réels faibles) et entraînaient l’économie dans un état de déséquilibre.

De plus, J.R. Hicks dans Valeurs et Capital apporte le concept « d’élasticité d’anticipation » comme le rapport entre l’inflation future et l’inflation actuelle. Si ce rapport est supérieur à l’unité, l’inflation va continuer d’augmenter, le processus sera cumulatif et en déséquilibre. Par contre, si l’élasticité d’anticipation est inférieure à un, les entrepreneurs vont réduire leur demande de fonds à cause de l’augmentation prévue du coût réel de leur financement. Celle-ci provoquera une diminution de l’inflation qui confirmera de nouvelles anticipations à la baisse ; le système retrouvera son équilibre initial mais cette  situation risque de réduire l’activité économique et l’emploi en particulier. Le concept d’élasticité d’anticipation de Hicks montre qu’une situation de déséquilibre peut revenir à l’équilibre mais cela se fait par rapport à des projections dans l’avenir qui sont à la baisse,  notamment en ce qui concerne l’inflation. Les charges de remboursement deviennent plus importantes, les entrepreneurs revoient à la baisse leurs anticipations, l’activité économique se réduit d’elle-même. On peut y voir une explication des crises économiques des années quatre-vingt surtout en les comparant aux années d’expansion économique des années soixante et soixante-dix.

L’analysé développée par I.Fisher dans son livre : The Theory of Interest permet d’apporter d’autres éléments pour la compréhension de la formation des taux d’intérêt nominaux et réels. Pour lui, le taux d’intérêt nominal est la somme du taux d’intérêt réel et du taux d’inflation anticipé. De cette formule, Fisher, en retient les conclusions suivantes : en période d’anticipations inflationnistes, le taux d’intérêt a tendance « à être élevé quand le niveau des prix est en hausse et bas quand le niveau des prix est en baisse ». De plus, dans un processus inflationniste, les ajustements ne se font pas immédiatement, il en résulte que l’apparition de taux élevés est décalée par rapport à l’inflation  actuelle. Fisher ajoute « le taux d’intérêt a nettement tendance à être élevé quand le niveau des prix est élevé et bas dans le cas inverse ». Dans la théorie de Fisher, les anticipations inflationnistes font monter les taux d’intérêt, surtout nominaux. Comme le rajoute Fisher, une baisse des anticipations fait diminuer les taux nominaux mais peut maintenir les taux réels au même niveau, ce qui peut aggraver la situation. En effet, la désinflation alourdit le service de la dette au titre du remboursement du capital emprunté (amortissement) et du paiement des intérêts  ; la baisse des taux nominaux  donne l’illusion, pour reprendre les termes keynésiens, d’une possibilité de relance mais les taux réels peuvent être maintenus à des niveaux élevés ce qui bloque l’investissement et obère de dettes les emprunteurs. La théorie fishersienne peut expliquer, comme l’analyse de Wicksell sur le taux naturel, une des causes des crises économiques, notamment dans les années quatre-vingt.

L’analyse de Fisher se centre surtout sur la crise des années trente et en particulier la grande crise de 1929-1933 mais elle peut nous permettre de comprendre celle des années quatre-vingt. En effet, Fisher, dans un article : « La théorie des grandes dépressions par la dette et la déflation », publié dans la revue : Econometrica (1933), détaille l’influence des taux sur l’activité économique. Il constate que le surendettement et la déflation peuvent être à l’origine de la dépression. Le surendettement est la conséquence d’une trop grande confiance dans l’avenir et dans les capacités d’innovation des entrepreneurs. Une période d’euphorie peut conduire à anticiper de forts taux de profit et solliciter l’octroi de crédits aux banques commerciales. Ce qui peut dégrader les ratios de liquidité des entreprises, alourdir le poids des dettes et provoquer une spéculation financière sur les marchés boursiers. Pour Fisher, cette expansion trop rapide conduit à une « bulle dans la dette » où comme on le remarque aujourd’hui il y a une déconnexion entre sphère financière et sphère réelle. La hausse des cours des actions « appelle » la hausse jusqu’au moment où une crise de confiance s’instaure et par effet de mimétisme détaillé et analysé par Keynes en particulier, les marchés basculent d’une position haussière à une position baissière généralisée. Un krach peut s’ensuivre et faire passer l’économie dans une phase, plus ou moins longue de dépression.

La crise boursière de 1987 peut être analysée à l’aide de la théorie de Fisher. La phase de dépression entraîne une contraction de dépôts et une baisse de la circulation de la monnaie ; ces effets conjugués à un ralentissement de l’activité économique, de la production, de l’investissement, de la consommation des ménages, font diminuer les prix, c’est une période déflation qui  commence. Fisher note à ce propos que la crise vient du fait que la « définition causée par la dette réagit sur la dette ». Cette analyse peut être rapprochée de la remarque de J.P. Fitoussi. En effet, Fisher constate que si les agents ne pensent pas rembourser leurs dettes au rythme de la diminution des prix, celle-ci s’alourdit en fait réellement et il écrit notamment : « Plus les débiteurs remboursent, plus ils doivent ». La dette peut diminuer en apparence, mais uniquement en termes nominaux, elle aggrave le poids des emprunts et contraint les débiteurs à la faillite. Ces phénomènes entraînent la société dans une crise économique généralisée seulesdes politiques, keynésiennes en particulier, peuvent essayer de l’enrayer. Mais juguler ce mouvement de dépression implique aussi de prendre conscience de phénomènes d’illusion monétaire. L’écart critique, entre le taux d’intérêt réel et le taux de croissance, montre qu’une période de  crise fait diminuer le second et augmente le premier. L’économie  peut rentrer ainsi dans un cercle vicieux où l’accroissement des taux d’intérêt fait chuter l’investissement qui contracte la production, la distribution de revenus et donc la consommation. Le taux d’intérêt réel est révélateur de perturbations de l’inflation et lui seul. Un processus cumulatif s’est enclenché où les actifs perdent de leur valeur, les dettes alourdissent le poids des remboursements, la valeur nette des entreprises diminue ; les profits, différence entre prix  de vente et coûts, s’effondrent ce qui conduit à réduire la profitabilité des entreprises. Ce climat peut entraîner les agents à faire d’autres choix en termes de placements et à préférer thésauriser la monnaie, ce qui fait diminuer la vitesse de circulation de la monnaie. La chute de la demande des prêts du fait du marasme économique fait diminuer les taux d’intérêt nominaux mais la déflation maintient les taux d’intérêt réels à des niveaux élevés. Fischer conclut son analyse sur le fait que deux variables : le surendettement et la déflation influencent sept variables  qui sont : la masse monétaire, sa vitesse de circulation, la valeur des actifs, les profits des entreprises, l’activité économique, la confiance des entrepreneurs et les taux d’intérêt réels en particulier. A l’aide de l’analyse de Fisher, nous comprenons la crise économique des années quatre-vingt, notamment en la comparant avec la décennie précédente. En effet, les années soixante-dix connaissent une période d’inflation, de croissance, même si les deux chocs pétroliers ont entravé le développement, et des taux réels faibles ou négatifs.

Les analyses sont corroborées par celles de Michel Aglietta dans : Macroéconomie financière (1995) où il détaille les taux nominaux dans la période :  1980 -1993. Il oppose deux phases dans l’histoire de la finance, celle où les taux nominaux ont augmenté et celle où ils ont baissé. Il remarque que les périodes où les taux nominaux à long terme s’accroissent sont caractéristiques des périodes où le taux de croissance de l’économie est supérieur au taux d’intérêt réel. Dans ce cas de figure, la rentabilité du capital productif est supérieure au coût du capital financier. L’endettement s’accroît  en valeurs absolues mais l’augmentation de revenu des nouveaux investissements productifs est supérieure aux charges financières des nouveaux emprunts. L’accumulation du capital et l’endettement exercent « une pression permanente sur le taux d’intérêt nominal à long terme ». Pour Michel Aglietta, le processus se dérègle quand l’inflation s’accélère, la « sensibilité grandissante à l’inflation fait monter les taux d’intérêt réels ». La crise économique des années quatre-vingt serait due notamment aux causes de la désinflation ou « déflation contrariée ». En période déflationniste, le taux d’intérêt réel ex post est supérieur au taux d’intérêt anticipé à cause de l’inertie des anticipations, ce qui entraîne une réduction de l’accumulation du  capital, les charges financières augmentent, la rentabilité du capital productif diminue par rapport au coût du capital financier. Dans cette phase, le taux d’intérêt réel est « systématique  supérieur au taux de croissance ». En période de déflation, les taux d’intérêt nominaux à long terme ont tendance à décroître. Ce n’est qu’après un long apprentissage, des faillites, des restructurations, un renouvellement des immobilisations que la rentabilité anticipée des projets d’investissement peut reprendre. La crise économique des années quatre-vingt et quatre-vingt-dix serait due à ces phénomènes où le taux d’intérêt réel est supérieur au taux de croissance, où le taux d’intérêt  ex post est supérieur au taux d’intérêt anticipé, où les forces déflationnistes réduisent l’accumulation du capital, la rentabilité des projets et augmentent les coûts financiers. La spirale déflationniste entraîne l’économie dans une phase de récession.

De plus, la structure du système financier, entre ceux qui ont une structure administrée et ceux à structure libéralisée, influence le niveau général des prix et les taux d’intérêt. Globalement la période 1980-1997 est marquée par une finance non intermédiée et plus de marchés financiers. Les régulations macroéconomiques ne se font plus par des indexations généralisées des prix et des salaires mais par des changements individuels et sectoriels, par plus de flexibilité. Dans le cas de figure où l’investissement projeté est supérieur à l’épargne, cela entraîne une hausse des  taux nominaux  et du fait d’une maîtrise de l’inflation des taux réels. Il en résulte une  éviction d’une partie des projets d’investissement donc une réduction d’accumulation du capital productif. Michel Aglietta note que la finance "libéralisée favorise une inflation stable et basse, mais entrave l’accumulation du capital".

Dans une période de récession, des ajustements sont nécessaires. Le durcissement de la politique monétaire comme ce fut le cas aux Etats-Unis et au Royaume-Uni a entraîné une augmentation des taux d’intérêt nominaux et réels à cour terme. Cet accroissement provoque une baisse du prix des actifs et une augmentation des charges financières dans les revenus. Michel Aglietta constate qu’au début des années quatre-vingt-dix, les chefs d’entreprise ont changé d’attitude en essayant de réduire le poids de la dette pour élever le taux d’autofinancement au-dessus de 100%.

La politique monétaire peut « casser » une spirale spéculative et inflationniste en augmentant les taux courts mais elle contraint les entreprises à s’autofinancer, à réduire leurs charges financières, et il s’ensuit une réduction des investissements et de la croissance. Michel Aglietta remarque que les « ménages comme les entreprises se comportent d’une manière qui entretient la récession ». La crise économique est en partie due à des ajustements récessifs qui réduisent les profits ; les entreprises sont obligées de vendre aux coûts marginaux ; elles « transmettent donc la déflation dans les échanges inter-entreprises ». la crise est due aux écarts entre taux d’intérêt réels et taux de croissance, entretenus par une période de déflation. Les entreprises sont obligées de passer par une phase de restructurations et d’assainissement qui est, bien sûr, coûteuse en terme d’emplois.

Les années quatre-vingt sont marquées par une période de désinflation et sur le plan de la politique économique d’un retour au libéralisme. Les Etats-Unis ont entrepris dès 1979 avec Paul Volcker à  la tête de la Fed, cette nouvelle politique. Le monétarisme supplante le keynésianisme, l’inflation est maîtrisée par la limitation de la création de monnaie centrale. Ce qui a pour répercussions d’augmenter les taux d’intérêts réels, de réduire les marges des entreprises qui préfèrent s’autofinancer, d'obérer les charges financières des emprunteurs dont notamment les pays en développement qui ne peuvent rembourser, d’amplifier le chômage et plus généralement la pauvreté. La dépression américaine se transmet au reste du monde par le biais de la hausse du dollar et des taux d’intérêt. L’investissement se ralentit, la dépression s’accroît, la croissance économique s’amenuise. L’influence des taux d’intérêt réels est déterminante sur la crise économique des années quatre-vingt et quatre-vingt-dix.

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