CRISE DE LA CONSOMMATION cours de SES seconde ES première ES terminale ES sciences économiques et sociales | ||||||||||||||||||||||||||||
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Comment expliquer ce qu’on appelle depuis la fin des années quatre-vingt : « La crise de la consommation » En 1981, juste après
la victoire de F.Mitterrand, le
nouveau gouvernement Mauroy choisit
de relancer la consommation. La politique budgétaire
fut expansionniste. En effet, la majorité de l’époque décida d’engager
de nombreuses réformes sociales et en particulier : une
baisse de la durée hebdomadaire du travail, une cinquième semaine
de congés payés, l’avancement de l’âge de la retraite
à soixante ans, l’embauche de nouveaux fonctionnaires, l’augmentation
des transferts sociaux, etc… Ce fut une politique résolument keynésienne
basée sur le déficit budgétaire, l’initiative de l’Etat, la volonté
de diminuer le taux de chômage par l’action sur les dépenses de consommation.
La consommation augmenta mais profita aussi aux producteurs étrangers,
ce qui entraîna trois dévaluations successives et une nouvelle politique,
baptisée : « politique de rigueur » et conduite par
L. Fabius. De cet exemple, on
comprend toute la complexité du monde économique où s’entremêlent
des décisions politiques, la réaction des marchés, les échanges internationaux.
De l’analyse des faits en particulier,
les économistes ont cherché à théoriser les dépenses de consommation.
L’approche peut se diviser en deux, d’une part une analyse microéconomique
basée sur le modèle de l’homo economicus, rationnel et maximisateur,
d’autre part sur une vision macroéconomique de données agrégées. Les
théories permettent de s’interroger sur les dépenses de consommation
en général, des particuliers, de l’entreprise et de l’Etat. Dans notre
cadre nous analyserons la consommation des ménages qui peut se définir
comme l’utilisation de biens ou de services destinés à satisfaire
des besoins et entraînant à terme leur destruction. Cette analyse
cernera le cas français en particulier, en couvrant la décennie quatre-vingt-dix
et en se centrant uniquement sur les dépenses des ménages. Nous nous
interrogerons sur les déterminants de la consommation et les différents
facteurs susceptibles de provoquer une crise de consommation.
La consommation varie-t-elle en fonction de facteurs structurels ou
conjonctuels ? Quelle est l’influence de ces facteurs sur la
baisse des dépenses de consommation dans les années quatre-vint-dix ? L’étude des déterminants
structurels permet de comprendre la crise de la consommation. L’influence
des taux d’intérêt, des impôts et prélèvements
obligatoires, la structure des revenus, l’inflation,…
peuvent infléchir la courbe des dépenses de consommation. Pour comprendre cette
baisse, on peut comparer les taux d’intérêt des années quatre-vingt-dix
avec ceux des années soixante-dix. Avant le premier choc pétrolier,
l’indexation des salaires sur le taux d’inflation, l’absence
de réelle concurrence ont fait grimper les prix. Il y avait une « fuite »
devant la monnaie, la renonciation à la liquidité coûtait cher,
(dans une perspective keynésienne, le taux d’intérêt étant
le prix de la renonciation à la liquidité). Pendant cette période
il fallait des taux d’intérêt élevés pour « attirer » l’épargne.
La situation a changé depuis les années quatre-vingt, en partie avec
l’aide des politiques de désinflation compétitive (maîtrise
de l’inflation et compétitivité des entreprises). Des taux d’intérêt
toujours élevés peuvent être un frein à la croissance et à la consommation
(voir la situation de nos jours avec le profit des entreprises). Comme dans le modèle
de Wisksell
qui concerne l’influence des taux d’intérêt sur l’investissement,
un taux d’intérêt inférieur au rendement espéré de l’investissement,
provoque la croissance de l’activité économique et par la suite de
l’inflation. Par contre, l’augmentation des taux d’intérêt ralentit
l’investissement. Pour les ménages, le processus est identique, des
taux d’intérêt élevés sont un obstacle à une forte consommation. L’influence
des taux d’intérêt est-elle seule déterminante sur les dépenses
de consommation ? On constate que les
taux de prélèvements obligatoires élevés peuvent nuire à la consommation.
Les taux de prélèvements obligatoires en France, étaient de 46 % en
1996 contre 31 % en 1960. C’est le quatrième taux mondial. Une baisse
des impôts voulue par l’ancien gouvernement ou pour favoriser la reprise
économique. La réduction d’impôts était de 25 milliards de francs.
Il est difficile de montrer la corrélation entre cette baisse des
impôts et l’augmentation des dépenses de consommation. De même, la politique
menée, en vue de réduire les déficits publics peut amener les
ménages à penser qu’ils paieront moins d’impôts futurs, donc à consommer
plus. Ce fut la politique adoptée par le gouvernement d’Alain
Juppé avant le changement de majorité en mai 1997. La politique de réduction
des prélèvements obligatoires voulue par le président Reagan
dans les années quatre-vingt a permis de relancer l’activité économique
aux Etats-Unis. Les économistes proches des idées du président s’appuyaient
sur la courbe de Laffer. Celui-ci
voulait montrer qu’une trop forte imposition des contribuables
était un frein aux recettes fiscales, à l’activité économique
du pays en général. Cette théorie peut se résumer en cette phrase :
« Trop d’impôt tue l’impôt ». les agents préfèrent
ne pas engager de nouveaux investissements, donc réduisent leur activité,
leurs revenus et leurs dépenses de consommation. Cette vision reste
néanmoins assez théorique puisque la baisse des taux d’imposition
voulue par le président Reagan n’a pas eu les effets escomptés. Le
déficit budgétaire augmenta et l’Etat dut s’endetter pour faire face
à ses dépenses. La diminution des impôts ne favorisa pas l’augmentation
des dépenses de consommation comme le pensaient les théoriciens de
l’offre mais ce furent les dépenses étatiques, conformément au schéma
keynésien des théoriciens de la demande qui encouragèrent l’augmentation
des dépenses de consommation. Il est difficile
de conclure sur une influence positive du taux de prélèvement sur
les dépenses de consommation. La baisse des taux ne favorise peut-être
pas l’augmentation des dépenses. Des taux trop élevés sont-ils des
freins à l’activité économique ? les changements de fiscalité
en France entre les années autre-vingt et quatre-vingt-dix ont pu
jouer mais uniquement à la marge. La crise de la consommation des
années quatre-vingt-dix est une crise beaucoup trop durable pour
l’imputer à une fiscalité trop forte. Il faut rechercher les
causes dans d’autres phénomènes, et en particulier, s’interroger sur
les anticipations des agents. Néanmoins on peut supposer que
l’alourdissement des prélèvements fiscaux et sociaux avec notamment
la création de la CSG (contribution sociale généraliste), du
RDS (remboursement de la dette sociale) et l’augmentation des
taxes locales (habitation, foncière) contribuent à freiner la consommation
des ménages. L’inquiétude
des agents face à l’avenir, dans de nombreux domaines, est aussi un
moyen de diminuer ses dépenses de consommation. On constate une crise
de la consommation et notamment
une forte récession en 1993. La persistance d’un taux de chômage
élevé en Europe et surtout en France amène les ménages à réduire leurs
dépenses et à se constituer une épargne de précaution. Comme le soulignent
Ph. L’hardy et D. Vallet 1975, dans la revue Economie
et Statistiques, dans un article intitulé : « Deux approches
des comportements d’épargne des ménages », le chômage a des effets
sur l’épargne. En effet, en période de fort taux de chômage, les ménages
se constituent une épargne de prévoyance. Le comportement de l’épargnant
a comme référence le passé et non l’avenir. Un fort taux de chômage
et des tensions sur le marché du travail peuvent amener les chefs
d’entreprise à réduire les revenus distribués aux salariés, ce qui
entraîne une diminution de l’épargne et de la consommation. Même si
les consommateurs ne s’adaptent que lentement aux fluctuations du
revenu, ils anticipent à la baisse des revenus futurs et une
situation sur le marché du travail de plus en plus précaire. L’augmentation
du taux d’épargne se fait au détriment de la propension à consommer
et sauf pour des produits où l’élasticité est faible, les dépenses
de consommation ralentissent, ce qui contribue à accentuer la crise
économique et sociale. Cette explication
de la crise peut s’appuyer sur la théorie du revenu permanent de M.Friedman
(développée dans son livre : Une théorie de la fonction de
consommation. Pour lui, le revenu effectif se partage entre le
revenu permanent et le revenu transitoire (non anticipé). Si les
ménages anticipent une baisse de leur revenu permanent, ils vont,
par conséquent, diminuer, dans une même proportion, leurs dépenses
de consommation. L’augmentation du
taux de chômage depuis les années quatre-vingt-dix modifie à la baisse
les anticipations des agents. Ils se constituent une épargne de
précaution, sorte de « matelas de sécurité », et diminuent,
en fonction des anticipations qu’ils font sur leurs revenus, les dépenses
de consommation. De 1990 à 1993, la
dégradation de l’emploi, le fort taux de chômage en France, peuvent
expliquer une diminution de la consommation de 1,8 %. A titre de comparaison,
la diminution de l’inflation avec l’effet d’encaisses réelles
que cela provoque (augmentation du pouvoir d’achat des ménages),
n’explique qu’une augmentation de la consommation de 0,25 %. Les autres anticipations
peuvent faire diminuer les dépenses de consommation, ce sont notamment
celles qui concernent le financement des retraites futures.
Avec la démographie actuelle, la diminution du nombre des actifs,
l’augmentation de l’espérance de vie, les ménages anticipent
des problèmes de financement des retraites. Notre système,
basé sur la répartition entre actif et inactifs, sera-t-il
suffisant pour financer les retraites de ceux qui en auront l’âge
en 2020-2030 ? La théorie du
cycle de vie d’Ando et Modigliani
décrit trois grandes périodes : « la jeunesse »,
« l’activité », et la « retraite ». Si les actifs
anticipent des problèmes de financement des retraites, ils auront
tendance à augmenter leur taux d’épargne et diminuer par conséquent
leurs dépenses de consommation. De plus, la volonté
d’instaurer en France, un système par capitalisation, et la
loi sur les fonds de pension, ont sûrement modifié les dépenses
de consommation. La loi de février 1997, proposée par le gouvernement
Juppé était destinée à la création d’un système de retraite
par capitalisation complémentaire au système actuel. L’augmentation
du taux d’épargne, dans une logique keynésienne, provient d’une diminution
de la propension à consommer. La médiatisation du problème possible des retraites, au cours des années quatre-vingt-dix,
a conduit les ménages à augmenter leur épargne et réduire leurs dépenses
de consommation. Des taux d’intérêt
réels élevés conduisent les ménages à avoir
une charge d’endettement importante et peuvent être
un frein à la consommation. De plus, l’incertitude sur l’avenir du
système de protection sociale, du financement des retraites, l’alourdissement
des prélèvements sociaux et fiscaux, la faiblesse des augmentations
salariales, la montée du chômage et de la précarité, l’augmentation
du rendement de l’épargne, et notamment des obligations, expliquent
en grande partie la crise de la consommation des années quatre-vingt-dix. D’autres
facteurs, plus conjoncturels et en apparence plus superficiels,
peuvent jouer et modifier les dépenses de consommation. Des événements
conjoncturels, comme la crise de la « vache folle »,
ont fait chuter les ventes des viandes bovines, notamment en 1996.
Auparavant dans les années quatre-vingt, les
Français se sont méfiés de la viande de veau, à cause
de l’élevage de certains veaux aux hormones de croissance Les attentats
terroristes, à Paris, en particulier, en 1995 et 1996, ont fait
aussi chuter les dépenses de consommation. Le conflit social de novembre-décembre
1995 a freiné les dépenses de consommation, notamment celles destinées
aux fêtes de fin d’année. Des conflits sociaux, l’incertitude politique,
des manifestations, des attentats, peuvent faire chuter les dépenses
de consommation. Le gouvernement d’Alain
Juppé organisa un sommet social à Matignon, en décembre
1995, pour relancer une consommation atone par des mesures fiscales.
Il constata que les français consacraient une partie de plus en plus
importantes de leur revenu à l’épargne (14 % en 1996). Les mesures
votées par le Parlement devraient permettre de relancer la
consommation. Les salariés pourraient pendant une période de quelques
mois, débloquer sans pénalité leur épargne salariale, les épargnants
pourraient puiser dans leur épargne (plan d’épargne populaire, plan
d’épargne logement) soit pour améliorer leur logement, soit pour acheter
des biens d’équipement. Pendant l’année 1996, le lancement des prêts
à 0 % a été aussi une mesure adoptée par le gouvernement pour favoriser
la croissance économique en général, et la consommation en particulier.
Les cessions de SICAV étaient exonérées d’impôt ou elles étaient réinvesties
dans la construction d’un logement. De nombreuses lois furent votées
par l’Assemblée nationale pour relancer la consommation. Les effets
sur l’économie furent faibles et difficilement appréciables. Des mesures
« conjonctuelles », en général, ne suffisent pas à infléchir
une courbe de consommation qui a tendance à stagner. Le manque de
confiance dans l’avenir, la peur de se retrouver au chômage, la précarité,
des contrats de travail à court terme, n’incitent pas les ménages
à consommer. On constate que des mesures gouvernementales ne permettent
pas de résoudre la crise de la consommation. Par contre, à un
autre moment, les primes en faveur de l’achat d’une automobile neuve
(primes appelées « juppettes » et « balladurettes »)
ont été instaurées pour relancer la consommation dans le secteur de
l’automobile. Ces primes ont permis de doper les ventes de voitures
neuves mais ont aussi encouragé les importations dans ce secteur. La crise de consommation
des années quatre-vingt-dix s’explique, en partie, par un mauvais
climat économique et social malgré de nombreuses menaces destinées
à relancer les dépenses de consommation. Le comportement du consommateur
serait-il susceptible d’influencer les dépense de consommation ? Robert
Rochefort qui dirige cette enquête, qualifie cette consommation
d’ « engagée ». Les différentes catégories socio-professionnelles
sont sensibles aux engagements pris par le producteur (respect de
la nature, embauche de personnes en réinsertion, licenciements en
dernier recours,…). Cette consommation « citoyenne » se
développe en corrélation avec la montée d’incertitudes dans notre
société. Elle traduit une volonté, de la part des consommateurs, de
« rassurance » comme l’exprime R. Rochefort dans
son livre, en 1955 : La société des consommateurs. C’est
une consommation qui souhaite trouver dans les objets matériels des
marques symboliques immatérielles (justice, protection, équité…). Cette étude permet
de comprendre le changement de comportement des consommateurs dans
les années quatre-vingt-dix par rapport aux années quatre-vingt. En
effet, pendant la décennie précédente, la consommation était forte
et stimulait l’activité des entreprises. La crise de la consommation
qui a suivi s’explique en partie par un comportement des consommateurs
plus réfléchi, plus attentif à l’entreprise, plus sensible aux valeurs.
L’analyse de R. Rochefort permet de comprendre ce nouveau comportement
et l’influence d’une consommation raisonnée. Des variables non
structurelles, plus comportementales, conjoncturelles peuvent expliquer
une partie de la baisse des dépenses de consommation dans les années
quatre-vingt-dix. Cependant on doit relativiser cette influence, elle
ne peut à elle seule expliquer la totalité de la crise. La
crise de la consommation dans les années quatre-vingt-dix s’explique
en grande partie, par des variables structurelles : l’influence
des taux d’intérêt, l’augmentation des prélèvements obligatoires,
la faiblesse des rémunérations, la constitution d’une épargne
de précaution, les rendements élevés sur le marché obligataires
en particulier, le dynamisme des bourses en général. La dégradation
sur le marché de l’emploi, le fort taux de chômage, le manque de confiance,
amènent les consommateurs à retarder ou annuler leurs dépenses de
consommation. Des variables plus conjoncturelles et psycho-sociologiques
peuvent s’ajouter à ces explications. La crise de la consommation
de la décennie est profonde et l’absence de stimulation des entreprises
entraîne l’économie dans un cercle vicieux. On pourrait s’interroger
sur notre période de mutation à l’aide des analyses de l’Ecole de régulation
qui a une approche diactronique des crises du capitalisme. |
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